Soutenance de thèse : Étude de la machinerie protéolytique ClpXP fonctionnelle et de sa protéine substrat FtsZ par résonance magnétique nucléaire en solution
Date
Vendredi 24 octobre de 14h00 à 17h30
Localisation
Salle des séminaires IBS
Par Astrid Audibert (IBS/Groupe RMN des grands assemblages)
Le complexe protéase caseinolytique X et P, ou ClpXP, est un protéasome bactérien. Il permet de dégrader les protéines non ou mal repliées, ainsi que les protéines destinées à la dégradation dans le cadre de processus de régulation cellulaire. Ce complexe est composé d’une partie strictement protéasique ClpP et d’un ou deux anneaux ClpX comportant chacun six sous-unités. La sous-unité ClpX est une AAA+ atpase (ATPase associée à diverses activités cellulaires) qui utilise l’énergie de l’hydrolyse de l’ATP pour produire du mouvement et déplier les protéines en une chaîne d’acides aminés qui sera transloquée dans le compartiment protéolytique. Les sous-unités ClpP sont des protéases à sérine qui s’auto-organisent en tétradecamer, sous forme de tonneau, pour cliver la protéine substrat en petits peptides à l’intérieur de la cavité.
Les récentes données structurales obtenues grâce à l’amélioration de la cryo-microscopie électronique ont permis de distinguer deux modèles majeurs de fonctionnement de ClpXP. Le principal point de divergence concerne le degré de coopération des différentes sous-unités ClpX lors du dépliement des substrats. L’un des modèles penche en faveur d’un mécanisme séquentiel, tandis que l’autre privilégie un mécanisme stochastique. D’autres études sont donc nécessaires pour mieux comprendre le fonctionnement de ce système. Il serait notamment intéressant d’étudier ce complexe dynamique en cours de dégradation de son substrat. La spectroscopie RMN en solution permet d’étudier en temps réel et à l’échelle atomique des macromolécules biologiques évoluant dans leur milieu ainsi que la cinétique des transformations qui les modifient. Cependant, plusieurs défis sont à relever afin de pouvoir étudier le complexe ClpXP par RMN liquide. La taille du complexe (760 kDa) le rend peu compatible avec la RMN en solution. De plus, l’instabilité de ClpX complique la production et la purification du complexe.
Au cours de cette thèse, un protocole a été développé afin de permettre la production du complexe ClpXP optimisé pour des études RMN et d’obtenir les premiers spectres 2D de ce complexe de très haut poids moléculaire. Pour ce faire, il a été nécessaire de combiner des méthodes de marquage isotopique des groupes méthyle et de perdeutération en utilisant un système d’expression acellulaire. Ces spectres ont révélé un complexe ClpXP très dynamique. L’ajout d’ATP et d’ADP a également révélé d’importants réarrangements structuraux des anneaux de ClpX induits par fixation des nucléotides. Dans une deuxième partie de cette thèse, les conditions de production et d’étude de la protéine FtsZ, substrat naturel de ClpXP, ont été optimisées. La dégradation de FtsZ par le complexe ClpXP a pu être reconstituée et caractérisée in vitro. FtsZ étant un analogue de la tubuline, cette protéine a tendance à polymériser. Une attention particulière a été portée à la caractérisation par différentes méthodes biophysiques de l’état d’oligomérisation de FtsZ dans les conditions de réalisation des expériences RMN. L’analyse de la diffusion par RMN (DOSY) s’est avérée particulièrement utile pour caractériser l’état de FtsZ en solution. Elle a montré que cette protéine forme de petits oligomères dynamiques en équilibre avec le monomère. Cette approche a permis de mettre en évidence que, en l’absence d’ATP, le complexe ClpXP était capable de dissocier les oligomères de FtsZ.
La mise en place de protocoles et de méthodes permettant l’étude de complexes protéiques de 760 kDa par RMN a permis de mieux comprendre la dynamique de ClpXP. Les premières études par RMN de dégradation de FtsZ par ClpXP réalisées dans cette thèse ouvrent la voie à des études fonctionnelles plus approfondies de cette dégradation par RMN, et à terme, à l’étude du mécanisme fonctionnel de cette machinerie par RMN en temps réel à l’échelle atomique.