Etudes mécanistiques et ingénierie des protéines fluorescentes

L’un de nos thèmes centraux concerne les études photophysiques des protéines fluorescentes phototransformables (PTFP). Les PTFP sont des acteurs fondamentaux de la microscopie à super-résolution ainsi que d’autres méthodes de fluorescence avancées, telles que l’imagerie "pulse-chase", l’imagerie par illumination modulée, le transfert d’énergie par résonance de Förster (FRET) photochromique ou le stockage de données biologiques.

Ces marqueurs de fluorescence génétiquement encodés sont fascinants car leur état de fluorescence peut être modifié par illumination avec une lumière laser appropriée.
 Par exemple, la couleur d’émission de certaines PTFPs peut passer du vert au rouge par illumination avec de la lumière violette (ce que l’on appelle les FP photoconvertibles, PCFP).
 D’autres PTFPs peuvent passer de manière réversible de l’état fluorescent à l’état non fluorescent en alternant la lumière cyan et la lumière violette (ce que l’on appelle des FPs réversiblement photocommutables, RSFP).

Les propriétés de phototransformation telles que la photoactivation, la photoconversion et la photocommutation doivent être comprises et optimisées pour chaque application. En outre, le clignotement (perte stochastique et transitoire de fluorescence) et le photoblanchiment (perte irréversible de fluorescence) sont des propriétés photophysiques cruciales qui sont observées chez toutes les protéines fluorescentes et que nous étudions en détail, bien qu’elles cachent encore de nombreux mystères.

De nombreux groupes dans le monde étudient et développent des protéines fluorescentes pour créer des marqueurs ou des capteurs toujours plus performants. Nous contribuons à ce domaine de recherche en étudiant les PTFPs à l’aide d’un vaste ensemble d’outils : nous utilisons généralement une combinaison de cristallographie cinétique (y compris XFEL en collaboration avec le groupe Dynamop), spectroscopie in cristallo, imagerie de molécules uniques in vitro et in cellulo et modélisation in silico (collaboration LCP, Paris Saclay), et récemment RMN en collaboration avec le groupe RMN).

Au cours des dernières années, nous avons largement concentré notre attention sur le clignotement et le photoblanchiment de PCFPs populaires tels que mEos4b. Ces processus photophysiques semblent présenter une complexité sans fin, mais nous les comprenons un peu mieux chaque jour. Par exemple, en collaboration avec l’équipe de P. Dedecker (KUL, Belgique), nous avons récemment déchiffré un mécanisme majeur de clignotement chez mEos4b rouge, qui provoque habituellement de sérieux problèmes de qualité et d’interprétation des données PALM quantitatives (qPALM) ou sptPALM, et nous avons montré que ce mécanisme est très étroitement lié aux mécanismes de photocommutation réversible en jeu dans les RSFPs. Cela nous a permis de proposer une astuce pour réduire le clignotement en sptPALM, de manière à permettre la reconstruction de tracks plus longues. Nous nous sommes également intéressés à la photophysique de l’état vert dans les PCFPs. En effet, bien que les PCFPs ne sont en général détectés qu’une fois photoconvertis à l’état rouge, ce qui se passe avant la photoconversion affecte considérablement leurs performances en tant que marqueurs SMLM. Récemment, en collaboration avec les équipes de J.B Sibarita et M. Sainlos (IINS, Bordeaux), nous avons démarré un projet financé par l’ANR visant à améliorer encore la photostabilité des PCFPs, en combinant des études structurales avec des approches d’imagerie en molécules uniques à haut débit pour permettre une ingénierie semi-rationnelle efficace.
De plus en plus, nous réalisons le lien important entre la dynamique des PTFPs et leur photophysique, de sorte que la RMN, qui peut aborder le comportement dynamique des protéines de manière très détaillée, devient également un outil central pour nos recherches.